The Crown, saison 4 : modernités

Les Britanniques ont un chic, celui de raconter des histoires et de les mettre en scène, parfois sans tabou, sans tomber dans le trash pour autant. C’est notamment le cas avec la réalisatrice et actrice Michaela Coel et son dernier projet I may destroy you – dont je vous ferai la critique très prochainement, après l’avoir tant promis ^^ – mais également avec d’autres séries. The Crownn’échappe à pas à la règle et son joli succès ne s’explique pas seulement en raison de son sujet. Peter Morgan, son créateur, continue d’explorer la vie publique et privée de la famille royale la plus connue et célèbre au monde ainsi que le règne exceptionnel (de par sa durée) d’Elisabeth II à travers différents faits sous le sceau de l’intrigue. 

Après trois saisons relatant chacune une période, cap sur les années 1980 qui sont celles de la rupture pour Elisabeth de Windsor et le Royaume-Uni. L’arrivée de Margaret Thatcher à la tête des Tories puis du gouvernement britannique change radicalement la donne et modifiera en profondeur les structures et les certitudes du pays. C’est dans ce contexte qu’une nouvelle venue fera son entrée dans la famille royale. Il s’agit de Diana Spencer, la future femme du prince Charles. L’héritier du trône, bien qu’éperdument amoureux de Camilla Shand (devenue Camilla Parker-Bowles) doit se résoudre à aller de l’avant mais surtout d’accomplir sa tâche, en se mariant. Un événement qui satisfait la reine Elisabeth, et comble de bonheur ses sujets. Cependant, cette magnifique image se fissure progressivement au fil des années, mettant progressivement à l’épreuve le couple princier et plus généralement la famille royale, une famille qui semble en décalage face à un monde qui bouge et évolue à grande vitesse. 

Après trois saisons de grande qualité mais qui péchaient en raison d’une certaine lenteur selon certains, la quatrième partie de The Crown marque une véritable rupture, à la hauteur des deux nouveaux personnages principaux introduits et incarnés avec brio par Emma Corrin pour Lady Di et Gillian Anderson pour Margaret Thatcher. L’une comme l’autre ont interprété avec force et gravité deux femmes aux caractères radicalement opposés mais qui ont durablement imprimé leur marque aussi bien sur la Couronne que sur le pays tout entier. Toutes deux incarnent un modernisme, LE modernisme, celui dans lequel la Grande-Bretagne se trouve plongé – à marche forcée parfois, vu la brutalité et la violence des réformes menées tambour battant par la Première ministre ou bien encore le style de Diana – et qui s’impose à une famille royale qui peine à l’accepter. 

Plusieurs scènes et épisodes indiquent clairement ce changement de style et d’époque notamment une où on voit Diana Spencer circuler en patin à roulettes avec son casque audio visé aux oreilles dans les couloirs de Buckingham Palace. Diana incarne la modernité, une certaine indépendance et une certaine insoumission, ce qui tranche avec la tradition portée par Elisabeth II. Diana comme Thatcher cassent les codes, ce qui en toute logique interroge sur le rôle et l’image des Windsor, non pas que la famille royale soit remise en cause mais qu’elle se sent progressivement déphasée. Diana et Thatcher (notamment vers la fin de la saison) paieront cash leur modernisme sans pour autant être remis en cause. Nul doute en effet, la décennie 1980 marque un avant et un après pour la Couronne et la Grande-Bretagne, de manière irréversible. 

Avec un très bon rythme, la saison 4 de The Crown est de très grande tenue, même si elle aurait gagné à évoquer en profondeur d’autres évènements marquants de l’histoire britannique (et royale), notamment le conflit nord-irlandais menée sans pitié par Margaret Thatcher ou encore la grève des mineurs de 1984, combattue sans ménagement par cette même Thatcher et qui durablement modifié les relations sociales outre-Manche. Une Margaret Thatcher que Peter Morgan a tenu à rendre « humaine », ce qui tranche avec sa réputation d’Iron Lady (Dame de fer) mais renforce le côté dramatique de l’histoire. Un côté que l’on retrouve également avec Diana qui, de jeune femme innocente et fragile, devient une mère de famille plus lucide dans sa relation avec un mariage qui prend l’eau et un prince Charles qui n’en s’en cache même plus au point de se jeter le discrédit sur les Windsor. Résultat des courses, on prend plaisir à enchainer les épisodes et on sort encore plus frustré, la cinquième saison s’annonçant culte (en raison des évènements encore plus riches qui sont survenus tout au long de la décennie 1990). Il faudra juste attendre deux ans et on ne pourra même pas blâmer la COVID19, pour ce long-délai ! 

The Crown 

Créateurs : Peter Morgan

Pays : Royaume-Uni 

Avec : Olivia Colman, Tobias Menzies, Helena Bonham Carter, Ben Danielsen, Josh O’Connor, Emma Corrin, Gillian Anderson…

Genre : biopic, drame

Saison : 4 

Episodes : 10

Durée : 47 – 61 minutes par épisode

Sortie : le 15 novembre

Diffusion d’origine : Netflix

Plateforme : Netflix

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